Nous débutons aujourd’hui une série de blogs traitant des coûts relatifs à la consommation électrique d’un immeuble commercial (bureau, industriel et commerce de détail) et plus précisément de l’imputation de ces coûts aux locataires par les bailleurs dans le cadre de l’administration de baux commerciaux.
Avant d’entrer dans le vif du sujet et pour faciliter la compréhension des lecteurs qui ne sont pas familiers avec les immeubles commerciaux, il est important dès le début de cette nouvelle série de bien identifier certains espaces et composantes de ces immeubles et de comprendre de quelle façon la consommation électrique fluctue dans chacun de ces espaces.
Les espaces et équipements communs
Les espaces communs d’un immeuble commercial sont constitués des aires qui sont disponibles et utilisables par l’ensemble des locataires, tel que le lobby, les corridors, les quais de chargement, les salles de bain, les ascenseurs, les monte-charges, etc. Les équipements communs sont les équipements qui desservent l’ensemble des locataires, sans pour autant que ceux-ci puissent physiquement y avoir accès, tel que les salles électrique, mécanique et de télécommunication, le système de climatisation, ventilation et d’air climatisé, etc.
L’énergie électrique utilisée pour éclairer, ventiler, chauffer et conditionner les espaces communs et pour faire fonctionner les équipements communs est désignée comme étant la consommation électrique commune de l’immeuble. Normalement, cette consommation fluctue peu ou pas selon le taux d’occupation de l’immeuble ou le nombre d’usagers des espaces communs. Chaque individu qui utilise les espaces et équipements communs utilise ni plus ni moins d’électricité que tout autre individu.
Les espaces locatifs
Les espaces locatifs, tel que le nom l’indique, sont les espaces réservés à la location et l’occupation par les locataires de l’immeuble. Ces espaces sont à usage réservé et exclusif des occupants et de leurs visiteurs.
L’énergie électrique utilisée pour alimenter les serveurs informatiques, les équipements de bureau, l’éclairage des locaux ou tout autre usage spécifique aux locataires, est désignée comme étant la consommation électrique des lieux loués. Cette consommation peut fluctuer de façon importante si un espace locatif est vacant ou s’il est occupé. De plus, la consommation peut varier grandement d’un locataire à l’autre selon le domaine d’activité du locataire et les équipements installés dans les lieux loués.
Oui, et alors?
Pour la majorité des locataires commerciaux, il est important que le bail qui les lie à leur propriétaire prévoie des règles différentes applicables à l’imputation des coûts de la consommation électrique des espaces locatifs de ceux de la consommation des espaces et équipements communs de l’immeuble. Et voici pourquoi.
Raison #1 : l’équité entre locataires (le consommateur-payeur)
Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, le profil de consommation électrique des espaces et équipements communs n’est pas le même que celui de chaque espace locatif de l’immeuble. Il est donc important que la consommation de chaque type d’espace soit mesurée séparément et que les coûts de cette consommation soient imputés aux bons utilisateurs afin d’assurer l’équité entre chacun de ces utilisateurs.
Comme l’utilisation de la consommation électrique commune de l’immeuble est la même pour chaque individu (occupant ou visiteur) circulant dans l’immeuble, il faut répartir également le coût de cette consommation à ces individus. Le nombre d’individus attribuable à un locataire est généralement directement proportionnel à la superficie que ce locataire occupe. Il est donc équitable que la consommation électrique commune de l’immeuble soit refacturée aux locataires en fonction de leur quote-part d’occupation de l’immeuble. Si un locataire occupe 10% des espaces locatifs de l’immeuble, il se verra imputer 10% de la consommation électrique commune.
Quant à la consommation électrique des lieux loués, il est important qu’elle soit mesurée séparément pour chaque locataire puisque la consommation au pi2 peut varier énormément d’un locataire à l’autre. Un nettoyeur consommera beaucoup plus d’électricité par pi2 qu’un bureau de professionnels. De même, deux bureaux de professionnels auront probablement des consommations différentes par pi2 selon les équipements qui sont installés dans ces bureaux. Par exemple, l’un deux pourrait héberger un très gros serveur informatique et l’autre pas. La répartition des coûts de la consommation électrique des lieux loués en fonction de la quote-part d’occupation de l’immeuble n’est donc pas une méthode de répartition équitable. La façon la plus équitable de répartir ces coûts est de mesurer spécifiquement et d’imputer la consommation réelle à chaque locataire de l’immeuble. Ceci peut se faire en installant des compteurs électriques mesurant spécifiquement la consommation de chaque locataire.
Raison #2 : il est illégal de générer un profit sur la revente de l’électricité
En vertu de la Loi d’Hydro-Québec et de la Loi de la Régie de l’Énergie, il est interdit à toute personne morale ou physique au Québec de faire du profit sur la revente de l’électricité à l’utilisateur final de cette énergie. Pour les fins d’application de ces règlements, ces deux entités considèrent que l’utilisateur final de la consommation électrique commune d’un immeuble en est le propriétaire alors que l’utilisateur final de la consommation électrique des lieux loués est le locataire.
Le propriétaire n’a d’autre choix que de distinguer les deux types de consommation afin de se conformer à ces lois et règlement. Étant donné qu’il ne peut réaliser de profit sur la revente de l’électricité des lieux loués, il ne peut donc pas ajouter au coût ainsi refacturé aux locataires, des frais d’administration (15% ou autre) car ces frais équivalent à une marge de profit.
Raison #3 : l’application des clauses de majoration (gross-up)
Certains baux contiennent une clause qui permet au bailleur de majorer artificiellement certaines dépenses qui varient en fonction du taux d’occupation d’un immeuble et de refacturer aux locataires, à titre de loyer additionnel, cette dépense majorée. Des explications concernant la raison d’être et la méthodologie de calcul de cette majoration artificielle, seront élaborées dans une série de blogs que j’aurai l’occasion de diffuser dans un avenir rapproché.
Pour le moment, contentons-nous de souligner que puisque la consommation électrique commune d’un immeuble ne varie généralement pas en fonction du taux d’occupation, elle doit donc être exclue du calcul de la majoration. La majoration doit s’appliquer uniquement sur la consommation électrique des lieux loués.
Prochain blog.
Quelles sont les erreurs, volontaires ou involontaires, que les bailleurs font le plus souvent dans la refacturation aux locataires des coûts de la consommation électrique d’un immeuble commercial? Ne manquez surtout pas mon prochain blog pour le découvrir…